Lettre de Poilus
Le 12 octobre 1917
J ' espère que tout se passe bien pour toi . Comment vont les enfants ? Je serais rentré à la maison pour la Toussaint car je suis blessé . Même si j ' ai mal , je suis content de vous revoir ...
Cela fait tellement longtemps que je n ' ai pas entendu vos voix . Je vais t ' expliquer comment c ' est arrivé .
Hier , alors que c ' était l ' heure de la soupe , le capitaine est arrivé accompagné de deux soldats . Il avait besoins de trois soldats pour accompagner des infirmiers sur le front , qui doivent aller chercher deux blessés visiblement il devait y avoir un cessez-le-feu réciproque car des allemands étaient en train de ramasser des corps et nos mitraillettes restaient silencieuses . J ' ai obéis et abandonné donc les discussions et la soupe qui , pour une fois était chaude . J ' ai aidé des infirmiers à monter les brancards hors de la tranchée . Sa y est , j' étais hors du trou , grouillant de rats et de puces . J ' avais la peur que me nouait le ventre : peur que l ' adversaire trahisse sa parole et qu ' il nous tires dessus . Mes coéquipiers ont coupé les barbelés . J ' ai aperçu déjà un des soldats , hurlant de douleur , le bras déchiqueté par les balles d 'un fusil allemand. Quelques minutes plus tard, après avoir cherché désespérément le deuxième soldat , nous sommes retournés à la tranchée J'ai fermé la marche lorsqu'un obus a explosé a quelques centaines de mètres de notre maigre convoi. Soudain, j'ai senti une vive douleur dans la jambe droite : un éclat d'obus venait juste de me rentrer dans le mollet. Mon cri s'étouffa dans ma gorge et j'ai perdu connaissance
Je me suis réveillé sur un lit de fortune, le tête lourde et la jambe douloureuse. Par la porte ouvert, je vis passer trois soldats accompagnés d'une dizaine d'autres et du général. J'ai appris plus tard qu'ils on étés fusillés car ils s'étaient rebellés. Le médecin s'est approché de moi et m'a expliquer que l'éclat d'obus avait explosé au moment où ils avaient touché ma jambe. Il avait fait les soins nécessaires , mais il craignait qu'il faille m'amputer jusqu'au genou : je serais donc transporté a l'arrière ce soir.
Si tu savais comme j'aimerais être amputer pour être démobiliser. Être près de toi et de nos cinq enfants, c'est tout ce que je demande. Je ne veux plus jamais toucher un fusil .Je ne veux plus entendre les obus , les cris des soldats en train de mourir ; je ne veux plus participer aux fusillades des soldats rebelles ... Je ne veux plus tuer un de mes semblables, qu'il soit Français ou Allemand .
J' ai attendu une heure environ. Un autre médecin accompagné de son assistant a examiné ma blessure au bout de cinq minutes et après délibéré de façon inaudible avec le capitaine, il m'a annoncé que je n'était plus apte a aller au combat
Je suis pressé de vous revoir , tous. Gros bisous aux enfants .. bon anniversaire a Louis ! !
Je t'aime
A bientôt Raymond